Chaque année, plus de 17 millions de foyers fiscaux bénéficient en France d’un abattement forfaitaire de 10 % sur leurs pensions de retraite. Cet avantage fiscal, appliqué automatiquement lors de la déclaration d’impôts, vise à compenser les frais professionnels… que les retraités n’ont pourtant plus. Un paradoxe pointé du doigt depuis plusieurs années et qui revient aujourd’hui sur le devant de la scène. Le gouvernement n’exclut pas sa remise en question dans le cadre des prochaines réformes budgétaires.
Un abattement contesté mais largement répandu
L’abattement de 10 % sur les pensions de retraite est accordé sans condition, dans la limite de 4 123 € par foyer fiscal (pour l’imposition des revenus 2023). Il s’applique automatiquement lors du calcul de l’impôt sur le revenu et concerne aussi bien les pensions du régime général que les retraites complémentaires.
Mais cette disposition fait débat. En effet, cet abattement est censé couvrir des frais professionnels, comme c’est le cas pour les actifs. Or, les retraités n’ont plus d’activité professionnelle. Ce décalage suscite des critiques, notamment de la part de la Cour des comptes et de certains économistes, qui estiment que ce dispositif est devenu injustifié, voire inefficace sur le plan budgétaire.
Pourquoi cette niche fiscale est-elle dans le viseur ?
En pleine recherche d’économies budgétaires, l’État s’intéresse de près à ce type de « niche fiscale », qui représente un manque à gagner d’environ 5 milliards d’euros par an pour les finances publiques. Plusieurs voix s’élèvent pour réduire ou supprimer l’abattement, dans un objectif de justice fiscale et de rationalisation des aides.
Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, n’a pas fermé la porte à cette option lors de récentes déclarations. Il a toutefois précisé qu’aucune décision n’était prise à ce stade, mais que toutes les pistes sont étudiées dans le cadre du projet de loi de finances 2026.
Cette hypothèse fait déjà réagir les associations de retraités, qui dénoncent une stigmatisation et alertent sur un risque de perte de pouvoir d’achat, en particulier pour les petites pensions déjà touchées par l’inflation.
Quelles conséquences pour les retraités si l’abattement disparaît ?
Si l’abattement de 10 % était supprimé ou diminué, des millions de retraités pourraient voir leur impôt sur le revenu augmenter. Pour certains foyers modestes, cela pourrait signifier un passage du non-imposable à imposable, avec à la clé :
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une perte d’exonérations, notamment sur la taxe foncière ou la redevance TV (si rétablie),
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une hausse des prélèvements sociaux,
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la fin de certaines aides locales ou avantages sociaux.
Le gouvernement pourrait néanmoins envisager des mesures compensatoires, comme le recentrage de l’abattement sur les petites retraites, ou une revalorisation ciblée du minimum vieillesse. L’idée serait alors de préserver les plus fragiles tout en réduisant la dépense publique.